«Bassin du fleuve Nil»

''Le Nil est un fleuve qui traverse dix États riverains dont cinq figurent parmi les dix pays les plus pauvres du monde. Leur pauvreté, associée à une explosion démographique alarmante et à la dégradation de l’environnement, nécessite la participation de tous les États riverains au développement des ressources du Nil.“Le traité pour l’utilisation totale des eaux du Nil”, conclu entre l’Égypte et le Soudan en 1959, divise le fleuve entre les deux pays. Les autres pays riverains, notamment l’Éthiopie - qui compte une population de plus de 60 millions d’habitants (et qui atteindra 120 millions d’ici 2025), d’où 86 % des eaux du Nil proviennent de ses plateaux - en utilise à ce jour seulement moins de 1 %. En dépit des besoins existants, l’Éthiopie n’a pas réussi à développer ses ressources en eau pour alimenter sa population, principalement par manque de ressources financières. Les politiques des institutions financières internationales telles que la Banque mondiale, qui ont augmenté les difficultés des pays riverains situés en amont à obtenir le financement des programmes de développement sans le consentement des pays situés en aval, ont contribué à aggraver la situation. Les sources bilatérales du financement n’ont rien changé au problème. Les investissements étrangers dans l’exploitation des eaux du Nil ont été pratiquement inexistants. Les États situés en aval ont donc maintenu le droit de s’opposer aux entreprises de développement des États situés en amont. La situation est telle que l’Éthiopie, dont le nom évoque immanquablement la sécheresse et la famine, est condamnée à attendre pendant que quelques États utilisent l’ensemble des eaux du Nil. De surcroît, pour aggraver la situation, ces derniers continuent d’introduire de nouveaux programmes d’irrigation de grande envergure. En conséquence, les pays situés en amont n’ont pas d’autres choix que de prendre unilatéralement des dispositions. Cependant, de nombreux pays situés dans le bassin du Nil, y compris l’Éthiopie, estiment que même si le partage des ressources en eau risque de déclencher un conflit, il est important d’agir conjointement. La coopération sur le développement du Nil n’est pas un fait nouveau. Des efforts ont été menés pour donner aux pays le droit d’exploitation du fleuve - par le biais d’entreprises communes telles queHYDROMET,UNDUGUetTECCONILE. Cependant, les tentatives se sont soldées par des échecs, principalement parce qu’elles n’ont pas réussi à gagner la confiance des États riverains ni à susciter leur participation. Beaucoup, dont l’Éthiopie, ont refusé de s’associer à ces programmes considérant qu’ils avaient pour but d’institutionnaliser le statu quo injuste sur les eaux du Nil, tel que l’attestait l’Accord de 1959. Des efforts bilatéraux en matière de coopération n’avaient, non plus, aucune chance de réussite. Il n’avait jamais existé un degré de confiance minimum nécessaire pour assurer une coopération. Mais la situation n’est pas désespérée; une lueur d’espoir brille à l’horizon. La Banque mondiale et les autres organisations internationales qui, du point de vue de certains États riverains, étaient impliquées depuis trop longtemps dans cette situation, ont décidé qu’il était temps de prendre des décisions. Les fonds dégagés par la Banque mondiale et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ont permis de lancer l’Initiative pour le bassin du Nil(IBN) et leCadre de coopération sur le Nil, deux programmes très différents qualitativement qui, pour la première fois dans l’histoire, ont réuni tous les pays riverains. Vu le degré de méfiance qui caractérisait la situation, assurer la participation de tous ces pays à des programmes de développement des eaux du Nil est une étape importante vers la coopération. La vision de l’INB - promouvoir un développement socio-économique durable par une utilisation équitable des eaux du bassin du Nil et une juste répartition des avantages de cette ressource commune - a été adoptée par tous les pays riverains. Ils ont même été au-delà et ont tenté de définir et de traduire cette vision en proposant des projets d’étude concrets. Une telle initiative est une grande réussite. Mais il ne faut pas perdre de vue que la tâche à laquelle nous avons à faire face est beaucoup plus ardue et beaucoup plus complexe. Chacun sait que la véritable stratégie de l’IBN est d’obtenir le consensus de tous les pays riverains sur les questions les moins controversées en remettant à une date indéterminée, ou au soin des générations futures, les questions fondamentales et litigieuses. Il ne fait aucun doute que les programmes établis dans le cadre de l’IBN ont pour objectif principal de renforcer la confiance. Les questions qui se posent sont donc de savoir si ces mesures d’“instauration de la confiance” ont une chance d’améliorer l’état chronique de méfiance et de suspicion qui a caractérisé le développement des eaux du Nil."

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