Un rapport secret envoyé au cabinet de Louis Michel le 16 février 2015 à 15h16 confirme le choix de Joseph Kabila par Paris et Washington.

Il y a en réalité deux positions au sein de ce qui est qualifié de “communauté internationale “. D’une part celle représentée par la France et les Etats-Unis qui soutiennent déjà la désignation, ou plus exactement le maintien, de Joseph Kabila au pouvoir et d’autre part celle de certains membres de la Commission Européenne qui souhaitent plutôt la tenue d’un scrutin libre et incontesté. Des négociations et des actions de lobbying se multiplient néanmoins à Bruxelles pour convaincre certains dirigeants congolais de se ranger derrière Joseph Kabila. Ses soutiens occidentaux se mobilisent beaucoup pour le rassurer de l’appui de la Communauté internationale c’est-à-dire essentiellement celui de la France et des Etats-Unis. Le Comité international d’accompagnement de la transition “ CIAT”, qui avait été mis en place pour servir de moyen de pression auprès des dirigeants congolais dans le but d’équilibrer le rapport de force politique, perd très vite de son autorité. Les grandes puissances, qui ont déjà pris parti pour Joseph Kabila, ne souhaitent plus l’intervention du CIAT, tout au moins, dans le processus portant sur l’élection du Président de la République du Con- go. Dans un rapport secret envoyé le 16 février 2006 à 15h16 au cabinet de Louis Michel par la délégation européenne à Kinshasa, il est écrit “La France et les Etats-Unis continuent d’ailleurs d’estimer que le CIAT n’a pas pour fonction d’intervenir dans es affaires congolaises, surtout lorsqu’il s’agit de celles du chef de l’Etat “. On lit plus loin “ Dans ce contexte, la France qui visiblement pourrait avoir convaincu l’Allemagne, estime que les experts/techniciens travaillant sur le processus électoral devraient avoir un rôle limité et laisser l’aspect politique aux diplomates et aux ambassadeurs ». Si la volonté de placer Joseph Kabila en position de vainqueur “ des prochaines élections devient incontestable et irréversible, une question néanmoins demeure. On comprend parfaitement que les Etats-Unis continuent de soutenir Joseph Kabila et Paul Kagame au vu de leur politique dans les Grands-lacs. Mais le suivisme de la France est moins évident. Est-ce pour la France un alignement aveugle sur la position des Etats-Unis ou est-ce une erreur d’appréciation de la personnalité de Joseph Kabila et de la nature de ses liens plus ou moins serrés avec Kigali ? Une chose est certaine, le soutien de la France à Joseph Kabila n’a jamais placé cette dernière en position de force, ni au Congo ni au Rwanda. Chaque fois qu’il en a l’occasion, le Président rwandais, Paul Kagame, s’évertue à invectiver les dirigeants français ou à les tourner en ridicule. Cet ancien maquisard à la culture sommaire et à la courtoisie limitée s’en prend pêle-mêle aux ministres et aux diplomates français sans que personne ne lui porte une réplique digne de ses amabilités. Jusqu’à présent, la “contre- offensive “ française dans les Grands Lacs est restée faible, peu ambitieuse et totalement insignifiante face à l’agressivité et à la stratégie anglo-américaine. Le dictateur rwandais a même poussé le zèle jusqu’à bannir le français au Rwanda pour faire de l’anglais la nouvelle langue officielle du pays et à intégrer le Commonwealth, au détriment de la France qui semble plus que jamais résignée à subir les tacles de ses alliés en Afrique. En vérité, Jacques Chirac ne voulait pas d’un affrontement avec George Bush, ni sur le Congo ni sur le Rwanda. Eprouvé par la tension avec les Etats-Unis durant la guerre irakienne, dépassé par le déploiement militaire américain – notamment la force Africom – dans son pré carré, usé par son dernier mandat et acculé par le bouillant Nicolas Sarkozy qui cherchait à tout prix à entrer à l’Elysée, le chef de l’Etat français aspirait surtout à prendre une retraite tranquille. Il a finalement choisi d’être conciliant avec Washington, évitant un bras’ de ter inutile. Cette position transparaît clairement lorsque l’auteur du rapport secret souligne l’attitude de la France et des Etats-Unis : “ Si le délai du 30 juin 2006 n’est pas respecté, ces pays n’hésiteront pas à faire “porter le chapeau” aux “experts” ainsi qu’au PNUD plutôt que d’avoir à reconnaître leur complaisance vis-à-vis des autorités congolaises et leur inertie au sein du CIAT. Fidèle à sa stratégie, la France veut faire primer le discours politique du “tout va bien Madame la marquise” sur la nécessité d’une pression sur les principaux dirigeants de la transition s’agissant de la réalisation dans un délai raisonnable, entre autres, des aspects techniques d’organisation des scrutins, de diffusion du matériel, de formation de personnel, du dépôt de candidatures, de leur dépouillement et des recours éventuels et occulte ainsi le temps nécessaire et incompressible de ces différentes étapes.

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