CHiNE POUR L'AFRIQUE : Pékin va prêter 60 milliards de dollars à l’Afrique pour la mettre sur sa route de la soie Il marque un ralentissement brutal des investissements chinois sur le continent. La « Chine- Afrique» a connu des périodes plus flamboyantes. Pour son premier sommet africain, Xi Jinping entend marquerl’ Histoire. Après une étape au Zimbabweet une poignée de main appuyée à un président Robert Mugabé au ban des nations depuis les années 2000, le président chinois a pris la route de Johannesburg. Sur place, il a retrouvé, vendredi 4 décembre, une cinquantaine de chefs d’Etat et de gouvernement qui représentent ensemble une populationde 2,5 milliards de personnes. Seul le Soudanais Omar Al-Bachir manque à l’appel, sa venue à Pékin,en septembre, ayant fait grincertrop de dents. Les relations commerciales Chine-Afrique en 4 chiffres. Le ralentissement de son économie rend la Chine moins dépendante des matières premières africaines, mais elle a besoin de débouchés pour ses entreprises. L’Afrique, pour sa part,« doit développerson secteur manufacturier,précise encore M. Abdoulkader. Créerdes emplois et renforcer la valeur ajoutée de ses produits ». C’est sans doute la raison pour laquelle une importante délégation d’entreprises chinoises a fait le déplacement à Johannesburg. Mais l’objectif principal de Pékin consiste surtout à relierle continent et ses futurs « trois réseaux » à la route de la soie tissée par le président chinois. Une route terrestre allant de Yiwu, au sud de Shanghai, à Madrid, en Espagne. Et une route maritime qui traverse l’Asie du Sud-Est en direction des côtes africaines via le Sri Lanka.« La route de la soie doit connectertrois continents et le président chinois a associé une soixantaine de pays à son projet »,précise Charmarke Abdoulkader. Le sixième Forum sur la coopération sino-africaine (Focac) s’est ouvert, vendredi 4 décembre, à Johannesburg ( Afrique du Sud. « Ce programme est la clef pour améliorerla compétitivité de l’Afrique et, pour cela, le continent a besoin de renforcersa coopération avec la Chine,écrivait, à la veille du sommet, le très officielQuotidien du Peuplequi y voit un plan Marshall pour l’Afrique. C’est la première fois qu’un sommet sino-africain se tient sur le continent. Depuis le premier Forum de coopération sino-africain (Focac) en 2000, les volumes commerciaux entre la Chineet l’ Afriqueont été multipliés par trente, atteignant quelque 300 milliards de dollars (275,8 milliards d’euros) en 2015 ; 2 500 entrepriseschinoises sont installées sur le continent. Cette fois, et malgré la crise, le régime communiste a donc triplé sesengagements et va annoncer, à Johannesburg, le lancement d’un projetde grands travaux avec des objectifs ambitieux, des moyens illimités et une appellation grandiloquente. Il s’agit des « Trois réseaux d’infrastructures et industrialisation », nous révèle Charmarke Abdoulkader, un consultant djiboutien installé à Shanghai qui a travaillé sur la définition de ce programme.« C’est un gigantesque projet qui mêle réseau ferroviaire à grande vitesse, réseau autoroutier et réseau d’aviation régional »,explique le consultant. Un maillage serré financé par Pékin et qui doit contribuerau développement économique de l’Afrique. Mais aussi, plus prosaïquement, à faciliter le transport et les exportations des matières premières africaines vers la Chine. La réunion a beau avoirété rebaptisée « sommet » à la place de « forum », pour soulignerson importance, elle s’ouvre dans une conjoncture défavorable. Les investissements chinois sur le continent ont chuté de 40 % au premier semestre 2015, conséquence directe du ralentissement de l’économie mondiale et d’une croissance chinoise passée sous la barre des 7 %. La Chine a ainsi perdu de sa boulimie pour les matières premièresafricaines. Beaucoup de pays du continent en souffrent. Lourdement endettés auprès de Pékin, ils arrivent à Johannesburg avec la ferme volonté de renégocier leurs dettes : c’est le cas notamment du Ghanaet, surtout, du Zimbabwe, deux pays qui connaissent de grandes difficultés de trésorerie en raison de l’effondrement de la demande chinoise. Pourtant, les dollars devraient continuerde pleuvoirsur le continent. A Johannesburg, le président chinois Xi Jinping vient de promettre60 milliards de dollars d’ aideà l’Afrique, principalement sous forme de prêts. Les chercheurs du Brookings Institutenotent que« la Chine double à chaque forum son aide à l’Afrique.On est ainsi passé de 5 milliards de dollars promis en 2006, à 10 milliards en 2009 et à 20 milliards en 2012 ». De nouveaux contrats ont été signés cette semaine entre Pékin et Hararé.« Mais cela ne va pas changernotre destin à court terme,explique Antony Hawkins, économiste à l’Université du Zimbabwe.Si l’on regarde le passé, on a le droit d’être sceptique. Les mégaprojets, les grands accords, les contrats… Nous avons toujours eu beaucoup d’investissements chinois ici, mais très peu de bénéfices réels pour l’économie. »

Chine-Afrique: La stratégie chinoise On assiste depuis quelques années à une effervescence autour de la présence de plus en plus importante de la Chine en Afrique. Les accusations sont nombreuses, tout autant que les promesses. Du côté de l’Occident, les medias et le milieu politique s’alarment: la Chine, en offrant des prêts sans demander de contreparties en termes de démocratie ou de gouvernance, détruit des décennies de travail de la Banque Mondiale et des agences de développement. On accuse la Chine de tous les maux: voler de la terre aux pauvres paysans, commercer avec des régimes ‘’parias’’. En Chine, on se défend de toute mauvaise intention. Pendant ce temps, la voix des africains se fait peu entendre. Les coeurs balancent. D’un côté, l’approche dynamique de la Chine en Afrique est revigorante et change des processus lents et bureaucratisés des bailleurs de fonds traditionnels. De l’autre côté, les frictions économiques et sociales causées par l’arrivée en masse d’entreprises et de travailleurs chinois inquiètent les populations locales. Il est donc essentiel de décortiquer les dynamiques à l’oeuvre, afin de donner à nos lecteurs les outils nécessaires à une prise de décision éclairée. Il s’agit aussi de dissiper les malentendus sur la question afin d’avancer vers une meilleure compréhension mutuelle des différents acteurs. Les raisons derrière l’implication de la Chine en Afrique sont tout d’abord pragmatiques. Les deux tiers des exportations africaines en Chine sont des ressources naturelles. En effet, le développement phénoménal de la Chine et les tensions récurrentes dans le Moyen-Orient qui poussent à la hausse les prix du pétrole ont poussé les dirigeants chinois à la recherche de nouvelles sources d’approvisionnement. Ils se sont donc tournés vers l’Afrique et ses ressources largement inexploitées, faute d’infrastructures. Ainsi, la Chine se concentre sur la construction d’infrastructures afin de gagner les faveurs des gouvernements africains. Le but de cette démarche est de devenir un partenaire privilégié, notamment dans l’attribution des chantiers nationaux, ce qui est souvent une condition des investissements chinois. Finalement, le développement d’activités en Afrique permet aussi à la Chine de réduire sa dépendance économique avec l’Europe et les Etats-Unis, notamment en cette période de crise et de repli sur soi. Plus récemment, la crainte d’un protectionnisme rampant et des pressions politiques occidentales sur les questions de politique étrangère (telles que la Syrie), mais aussi le risque d’un ralentissement brutal de l’économie chinoise en 2012 attisent le désir des dirigeants chinois de diversifier leurs amis. Quelles sont les raisons de l’implication chinoise en Afrique ? Quelle stratégie utilise-t-elle pour atteindre ses objectifs? Les relations Chine-Afrique (2) : La stratégie chinoise. Et c’est bien d’amitié qu’il s’agit quand on parle de l’Afrique en Chine. Dans le même temps, le gouvernement chinois incite ses entreprises et entrepreneurs à s’installer en Afrique. Il s’agit de profiter de la bonne dynamique des relations Chine-Afrique pour s’insérer sur les marchés africains à fort potentiel de développement. En Europe et aux Etats-Unis, les entreprises chinoises ont du mal à s’implanter, à cause de la peur des gouvernements et des populations (le retour du « péril jaune »). A l’opposé les gouvernements africains accueillent à bras ouverts les investissements chinois qui créent des emplois et relancent souvent des économies oubliées par l’Occident. Cela permet aux entreprises chinoises de gagner l’expérience internationale qui leur manque pour être plus efficaces dans la compétition globale, mais aussi pour monter dans la chaîne de valeur. De fait, les entreprises chinoises s’attachent à délocaliser des filiales en Afrique et un certain nombre d’activités polluantes et ntensives en main d’oeuvre peu qualifiée. Cela n’est pas sans nous rappeler les délocalisations japonaises en Chine dans les années 1970. Dans cette perspective,cet article est le deuxième d’une longue série portant sur les relations entre la Chine et l’Afrique, qui aborderont des questions tant économiques que politiques et sociales. Il faut comprendre la stratégie africaine de la Chine comme intégrée à un tout, à savoir la stratégie de développement général de la Chine. Celle-ci inclut notammentle développement dusoft powerchinois, à savoir la capacité d’un pays à obtenir ce qu’il veut non par la coercition mais par son influence.Trois aspects se dessinent. Le plus important est celui de la construction d’un groupe d’amis qui supporte la Chine au plan des relations internationales. Les pays africains représentant plus du quart des membres de l’Assemblée Générale aux Nations-Unies, leurs votes combinés ont souvent permis de protéger la Chine de sanctions au sein de la Commision pour les Droits de l’Homme. Simultanément, la conquête progressive du support des pays africains a permis a la Chine d'être le géant.

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