INSÉCURITÉ DANS LA PROVINCE DU NORD-KIVU DÉPUIS: L’est de la République Démocratique du Congo a connu des conflits depuis l’indépendance du pays en 1960. Le pire des conflits a frappé la région à la fin des années 1990 et est toujours en cours. La zone la plus touchée par le conflit dans l’est de la RDC est larégion du Kivu.Avec sa superficie d’environ 120 000 kilomètres carrés et ses 12 millions d’habitants, la région du Nord-Kivu et du Sud-Kivu (voir carte ci-contre) sont plus grandes que le Burundi et le Rwanda réunis et la région n’est pas aussi densément peuplée que le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda. La région du Kivu est connue pour son sol très fertile dans le Nord et pour avoir d’importants gisements de minéraux précieux tels que la cassitérite, l’or, le coltan, la wolframite, le Pro chlore, le diamant, l’améthyste et les tourmalines, dispersés dans le Nord et le Sud de la région. Le conflit en cours dans la région du Kivu constitue l’un des obstacles au développement social et économique de la région depuis des décennies. Le nombre de morts dans la région suite à ce conflit est estimé à six millions. Les citoyens de la région continuent de souffrir psychologiquement et physiquement de crimes horribles tels le viol et des déplacement forcés en raison de guerres continuellement en cours dans la région. L’environnement est également en jeu, car partout où les personnes déplacées s’installent, la déforestation prend cours. La contrebande de bois nuit également à l’environnement. Le conflit dans l’est de la RDC a fait de la région du Kivu un environnement hostile pour les investissements en dépit de ses ressources abondantes notamment en minéraux précieux, terres fertiles, forêts, attractions touristiques et potentiellement deux milliards de barils de réserves de pétrole au fond du Lac St-Albert, près de la frontière avec l’Ouganda. Il est clair que le Kivu a été le grand perdant suite à l’instabilité permanente dans la région. Mais les affirmations que les pays voisins de la région, à savoir le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda, ont profité économiquement de cette instabilité peuvent être contestées. Ce qui suit est une liste des opportunités économiques perdues, selon moi, par les citoyens du Burundi, Rwanda et de l’Ouganda suite au conflit en cours dans le Kivu. Opportunités ratées de développer une coopération commerciale Le conflit dans l’est de la RDC n’a jamais permis au Burundi, au Rwanda et à l’Ouganda de construire des relations solides et durables avec la RDC. Cela s’explique en partie par la participation présumée de ces pays dans le conflit dans le Kivu. Si de bonnes relations entre la RDC, le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda avaient été développées, une coopération commerciale visant à capitaliser sur les ressources naturelles de la région de Kivu pour promouvoir le développement économique de toute la région des Grands Lacs aurait pu être développée et mise en œuvre. Cela aurait pu être réalisé en engageant des discussions de coopération avec la RDC par la Communauté économique des pays des Grands Lacs (CEPGL), une organisation sous-régionale mise en place en 1976 entre autres pour promouvoir la coopération entre le Burundi, la République démocratique du Congo et le Rwanda. L’Ouganda aurait ensuite pu rejoindre la CEPGL de la même manière que le Burundi et le Rwanda ont rejoint la Communauté d’Afrique de l’est (CAE) en 2009. Malheureusement, en raison du conflit à l’est de la RDC et des relations tendues avec la RDC, le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda ont manqué l’occasion d’exploiter leur avantage de la proximité géographique avec la riche région du Kivu et de promouvoir ainsi le progrès social et économique durable dans leurs pays respectifs. Récemment la RDC a introduit l’obligation de visa pour les Rwandais entrant au Congo par la frontière de Rusizi-Bukavu. Alors que les motifs de cette décision sont encore inconnus, tout indiqueque la décision a déjà eu un effet néfaste sur les communautés frontalières de la région, ayant perturbé le commerce ainsi que l’éducation pour les étudiants rwandais qui vont à l’école en RDC. Il reste à savoir comment le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda amélioreront les relations acrimonieuses qu’ils ont avec la RDC pour que la coopération économique souhaitée avec la région du Kivu soit établie. Cela serait en effet dans l’intérêt de tout le monde. Monopole sur le marché et perte de revenus Le conflit en RDC a facilité la contrebande de ressources naturelles de la région du Kivu vers les marchés mondiaux viale Burundi, le Rwanda et l’Ouganda. Toutefois, cela ne signifie pas que les économies de ces pays ont bénéficié de ce commerce illicite. Seules les personnes impliquées dans le pillage et le commerce des ressources naturelles de la RDC ont profité de ces activités, pas les économies de ces pays. Le marché des ressources naturelles de l’est de la RDC est un monopole, il est ouvert uniquement à ceux qui ont le pouvoir et la capacité de coordonner la haine.

D’autres conflits dans la région ne feront qu’empirer le développement économique et social des régions des Grands Lacs. Ils auront des répercussions supplémentaires sur les secteurs clés que sont le tourisme et les ressources naturelles pour l’économie du Rwanda et de l’Ouganda. Selon les données de la Banque mondiale, le tourisme international au Rwanda et en Ouganda constituait respectivement 35% et 24% des exportations totales des deux pays en 2010. Plus de conflits mettront à risque le tourisme au Rwanda et en Ouganda, car les attractions touristiques les plus visitées, le Parc national des Volcans du Rwanda et le Parc national des gorilles de Mgahinga en Ouganda, connus pour accueillir les rares et extraordinaires gorilles de montagne, sont situés près des frontières avec l’est de la RDC. À terme, les conflits continus dans l’est de la RDC nuiront à l’affluence des touristes en ces lieux situés à proximité des zones de conflits.
De plus, le Rwanda a des gisements de gaz naturel sous le Lac Kivu tandis que l’Ouganda a des réserves de pétrole estimées à 3,5 milliards de barils sous le Lac Albert. Ces ressources étant situées à proximité des zones de conflits, il existe un risque non négligeable que les conflits s’en rapprochent. Tout éclatement de guerre près de ces lacs pourrait retarder ou ralentir l’exploration gazière au Rwanda et la production de pétrole en Ouganda, et ainsi entraver le développement économique et social futur des deux pays.
Enfin, d’autres preuves de l’implication du Rwanda dans le conflit à l’est de la RDC pourraient conduire à de nouvelles suspensions de l’aide, ce qui réduirait la performance économique du pays, importante pour la notation du pays sur le marché international qui est cruciale pour attirer les investisseurs et mobiliser les fonds pour les projets de développement.
Globalement, affirmer que le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda ont tiré profit de l’instabilité à l’est de la RDC devrait être étayé par des preuves solides. Le points cités ci-dessus démontrent que l’instabilité en RDC a bénéficié au très peu d’individus directement impliqués dans le commerce des ressources naturelles pillées, au détriment même du développement social et économique des citoyens ordinaires de la RDC, du Burundi, du Rwanda et de l’Ouganda.
Un danger pour la Communauté de l’Afrique de l’Est
Le conflit dans l’est de la RDC a montré à quel point il était dangereux en créant des tensions parmi les états membres de la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE). Par conséquent, les relations entre les membres de la CAE ont été mises à risque et leur coopération économique au sein de la CAE mise en péril. La CAE est une organisation régionale intergouvernementale entre les républiques du Burundi, du Kenya, du Rwanda, de l’Ouganda et la République-Unie de Tanzanie. Les objectifs de la CAE sont d’élargir et d’approfondir la coopération entre les États partenaires, notamment dans les domaines politiques, économiques et sociaux pour leur bénéfice mutuel. La communauté a établi une union douanière en 2005 ainsi qu’un Marché commun en 2010. Ainsi, l’ensemble de la région offre une base de consommateurs de plus de 130 millions de personnes.
De plus, la CAE a de nombreux projets qui, s’ils sont réalisés, pourraient apporter plus de perspectives économiques pour ses citoyens. Par exemple, les Etats membres prévoient de construire de nouvelles lignes de chemin de fer qui pourraient donner au Burundi, au Rwanda et à l’Ouganda accès à l’océan Indien via les ports de Dar Es Salam en Tanzanie ou de Mombasa au Kenya. Cependant, les bonnes intentions de la CAE pour l’ensemble de ses membres ont été perturbées quand les tensions du conflit en RDC se sont étendues parmi ses membres. En effet, les tensions sont montées entre la Tanzanie et le Rwanda après que la Tanzanie ait suggéré au Rwanda de négocier avec les FDLR, un groupe rebelle armé actif dans l’est de la RDC. Elle a été suivie par une guerre des mots entre le Rwanda et la Tanzanie. Par la suite, la Tanzanie a été isolée au sein de la CAE.Dans une certaine mesure, la Tanzanie dût se plaindre officiellementau Conseil des ministres de la CAE pour avoir été mise de côté. La pire des craintes aurait été que la Tanzanie se retire de la CAE, emportant avec elle toutes les opportunités économiques qu’elle a à offrir aux autres membres de la CAE, notamment sa base de consommateurs de 45 millions de personnes, les opportunités commerciales liées à son gaz naturel, à son uraniumet autres minéraux, l’accès qu’offre la Tanzanie vers les marchés du Malawi, de la Zambie et du Mozambique et à l’océan Indien, les bonnes relations de la Tanzanie avec la RDC riche en ressources naturelles, et la bonne réputation dont jouit la Tanzanie au sein de la communauté internationale pour sa bonne pratique des valeurs démocratiques. Ce sont ainsi des avantages significatifs que d’autres membres de la CAE n’ont pas nécessairement et dont ils pourraient tirer parti pour la réalisation.

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