CENI RDC : Corneille Nangaa, Président de la CENI, fait l’objet des critiques les plus acerbes depuis qu’il a posé la grande problématique de l’organisation des élections en cette année 2016. Son seul tort est d’avoir dit à haute voix les vérités que tout le monde susurrait jusque-là au sujet de l’organisation ou pas des élections en 2016. En effet, dans une adresse qu’il a faite le 16 février dernier aux acteurs politiques et de la société civile, le Président de la CENI a fait savoir que le processus électoral est sur un chemin critique et qu’il s’avère impossible d’organiser des élections crédibles dans le délai constitutionnel.

Connaissant les réalités des élections de 2006 et 2011 et au regard de la tension qui couve actuellement, organiser les élections dans ces conditions c’est, comme je l’indique plus haut, préparer le pays à des conflits interminables et aux conséquences qu’on n’a pas à présenter ici.
La solution sera politique et non technique
A ce stade, la CENI, qui est un organe technique, a exposé ses conclusions après, avoir, quelques mois plus tôt, fait état des écueils pour l’organisation des élections dans les délais requis. Elle avait clairement indiqué que les options à lever pour la poursuite incombe aux politiciens. Et la commission des affaires étrangères du sénat américain avait aussi relevé, la semaine dernière, que la solution pour la relance du processus électoral est d’ordre politique et non technique, ce qui amène à conclure en la nécessité du dialogue dont l’objectif est, justement, l’organisation et la tenue des élections apaisées.
Depuis lors, je constate avec regret que l’opposition, au lieu de jouer la carte de l’apaisement, multiplie des stratagèmes qui tendent à conclure que c’est elle qui, en fin de compte, ne veut pas de ces élections, et cela pour des raisons qui lui sont propres. Depuis plus de trois ans, j’ai constaté qu’à chaque avancée, l’opposition se distingue par des revirements de position. C’est, par exemple, elle qui avait réclamé le dialogue avant de le rejeté. C’est aussi elle qui avait rejeté le calendrier électoral global avant de le rejeter à sa publication par la CENI. Aujourd’hui c’est elle qui conteste la durée prévue de la révision du fichier électoral, alors que la configuration administrative du pays a changé et que cette même opposition réclame l’extension des élections à la diaspora congolaise.
On ne peut pas demander une chose et son contraire à la fois. Ou bien les radicaux de l’opposition savent ce qu’ils veulent, ou bien ils jouent un sale jeu dont la RDC ne tire aucun profit. Dans tous les cas, il est inadmissible qu’une poignée de Congolais prennent tout le pays en otage pour leurs ambitions personnelles et les intérêts de leurs parrains occidentaux.
Les Congolais ne sont plus dupes de ce genre de manœuvres. Tout est aujourd’hui clair que si l’on veut vraiment des élections à bonne date, comme disant les organisations internationales, le mieux à faire c’est de s’asseoir pour régler tous les écueils qui se posent. Sauf si, bien sur, on ne veut pas de ces élections telles que les radicaux de l’opposition tendent à nous convaincre. Etienne Tshisekedi est toujours demandeur du dialogue, que son parti continue de considérer comme l’unique voie de sortie de la crise politique qui secoue le pays depuis les élections chaotiques de novembre 2011. Mais, contrairement à ceux qui croient qu’il pourrait favoriser ou accompagner le fameux « glissement », il s’en tient à un forum entre les congolais. Il a notamment expliqué que la révision du fichier électoral pourrait durer au minimum seize mois. Ce n’est pas la première fois que cette question de fichier électorale se posait. Depuis plus d’une année, l’opposition elle-même, notamment l’ECIDE de Martin Fayulu, posait la nécessité de la révision du fichier électoral. Fayulu et bien d’autres radicaux de l’opposition avaient même rejeté les conclusions de l’audit de ce fichier électoral réalisé par l’Organisation Internationale de la Francophonie.
La vérité incontournable du terrain : Tout, sur terrain, indique aujourd’hui la nécessité de la reconstitution d’un nouveau fichier électoral à travers un enrôlement général des électeurs, et pas seulement des nouveaux majeurs. J’ai personnellement été témoin des écueils qui se posent aujourd’hui et qui sont tels que, dans les conditions actuelles, les élections ne réuniraient pas les conditions de transparence et de crédibilité, ce qui serait de nature à miner l’avenir de la RDC avec des contestations des résultats.
En effet, au cours d’une mission que j’avais effectuée à Uvira, dans le Sud-Kivu, j’ai vu personnellement des personnes détentrices des cartes d’électeurs produites dans les pays voisins. Des cartes émises, pour la plupart, en 2015, alors que la CENI n’en a plus émis depuis 2012. Les détenteurs de ces cartes sont aussi bien des étrangers que des Congolais dont certains ont perdu les leurs, mais s’en sont fait fabriquer de fausses, notamment pour faciliter leurs déplacements dans la région des Grands Lacs. Des kits électoraux avaient, en effet, été volés en 2011, et ils servent aujourd’hui dans des pays voisins. Ce n’est pas seulement à l’Est que cette réalité s’observe. Elle concerne l’ensemble du pays, Kinshasa la capitale y compris. Le Président de la CENI avait, à ce sujet, fait personnellement une expérience. Il avait, en effet, remis à un chauffeur de la CENI 40 $ en lui demandant de lui trouver une carte d’électeur. C’est sans surprise que, une heure après, il a vu le chauffeur revenir avec deux cartes d’électeurs dûment remplies et portant sa photo (à lui le chauffeur).

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