Comprendre des massacres encours ce dernier temp dans la région de Beni. Dans ce vaste territoire, la population subit des massacres depuis 2014, symboles d'une guerre sans nom qui fait rage à l'est de la République démocratique du Congo. Le 14 août dernier, le territoire de Beni subissait un nouveau massacre de ses habitants. Pourtant, face à l'ampleur de ces agressions, la réaction de la communauté internationale et du gouvernement congolais reste fantomatique, tout comme on peine à identifier les tueurs.

Difficile d'identifier toutes ces milices. Celle qui sévissait principalement entre 2012 et 2014, le M23, a été déroutée. Aujourd'hui, des milices congolaises plus ou moins alliées à l'armée régulière comme les factions Maï-Maï et Raïa Mutumboki mènent à leur tour des actions violentes selon Jeune Afrique, mais des groupes armés étrangers attaquent également la RDC comme les Forces de libération du Rwanda (FDLR), les Forces nationales de libération du Burundi (FNL), ou encore les Forces démocratiques alliées (ADF).
Les ADF : la milice pointée du doigt
C'est cette dernière milice qui est accusée de la plupart des massacres commis dernièrement dans le territoire de Beni. Les ADF sont un groupe armé ougandais luttant à l'origine contre le régime du président ougandais Yoweri Museveni depuis 1995. Selon Jeune Afrique, des militants du Tabliq, un mouvement missionnaire musulman, ont d'abord composé les rangs des ADF avant de se radicaliser. Maintenant uniquement composé d'islamistes, le groupe armé est commandé depuis 2007 par Jamil Mukulu, un chrétien converti à l'islam. Les États-Unis l'ont placé sur leur liste d'organisations terroristes dès 2001.
Des massacres récurrents à Beni
À la fois ville de 95 000 habitants mais aussi territoire, Beni se situe dans le nord-est de la RD Congo, dans la zone très sensible du Nord-Kivu. Frontalier de l'Ouganda, il est un point de passage du trafic des ressources et de la milice des ADF.
Le dernier massacre a fait 51 morts
Les massacres ne connaissent pas de trêve. Dans la nuit du samedi au dimanche 14 août 2016, 51 civils ont été assassinés à la machette à Beni, selon Teddy Kataliko, membre de la Coordination de la société civile. Le gouvernement parle quant à lui de 42 victimes. Encore une fois, l'armée impute le massacre aux rebelles ougandais musulmans des Forces démocratiques alliées (ADF).
Alors que Beni respectait trois journées « ville morte » en hommage aux victimes, deux personnes, dont un policier, ont été tuées mercredi, au dernier jour de ce deuil national, selon l'AFP. Ces violences ont éclaté alors que plusieurs centaines de personnes manifestaient contre l'inertie des autorités face aux massacres qui ont fait plus de 650 victimes depuis octobre 2014. La veille, la foule demandait d'ailleurs la démission du Premier ministre congolais Augustin Matata, passé furtivement à Beni après les événements tragiques.
La manifestation du 17 août 2016 montre à quel point la population, terrorisée par son insécurité, sombre elle aussi dans une certaine ambivalence entre désir de paix et violences :
La zone est envahie de centaines de groupes armés violents et subit un trafic illégal de ses richesses qui rend difficile l'identification de ses assaillants. Dans ce contexte, la RDC, que son lourd passé poursuit, subit une guerre silencieuse et sans nom.
La RDC : un État construit sur le modèle de la rébellion
Les violences qui touchent l'est de la RDC ne sont pas nouvelles. La tragédie congolaise qui sévit depuis 20 ans trouve en effet son point de départ dans le génocide perpétré au Rwanda en 1994. À la suite du massacre, près de 1,2 million de Hutus rwandais, parfois impliqués dans le génocide, ont fui vers le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, territoires du Zaïre, aujourd'hui disparu. En effet, en 1996, l'armée du très décrié président zaïrois Mobutu fait face à l'insurrection de l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), dirigée par un homme, Laurent-Désiré Kabila. Il parvient à s'emparer de la capitale Kinshasa l'année suivante : le Zaïre devient République démocratique du Congo.
Malgré ce renouveau, des rebelles déçus par l'absence de changement se soulèvent contre le gouvernement Kabila dans les deux provinces du Kivu en 1998, soutenus par le Rwanda et l'Ouganda. Le cessez-le-feu réclamé par l'ONU entre tous les belligérants est conclu en 1999, mais des milices rebelles continuent à sévir en RDC, même après l'élection de Joseph Kabila, le fils de Laurent-Désiré Kabila, en 2001. Fragilisée par cette tension politique, la RDC est le terrain de chasse idéal pour ses voisins qui connaissent ses richesses exploitables.
Des richesses qui attisent les conflits
Au moment de l'insurrection contre le gouvernement Kabila en 1998, l'Ouganda et le Rwanda ne se retournent pas contre leur ancien allié dans une simple motivation démocratique. La RDC regorge de richesses naturelles, inexploitées pour le compte des habitants, mais qui font l'objet de toutes les convoitises des États voisins. Quand les conflits s'enlisent, leur présence militaire permet de perdurer un trafic des plus fructueux. Ainsi, l'Ouganda y pille essentiellement le diamant et l'or, tandis que le Rwanda exploite surtout le coltan, mais le cuivre et le cobalt sont aussi dérobés. Global Witness a même avancé qu'entre fin 1999 et fin 2000, l'armée rwandaise avait à elle seule engrangé des revenus d'au moins 20 millions de dollars par mois.

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