Présidentielle: "Ali réélu", "C'est Ping", la presse gabonaise divisée. La presse gabonaise était aussi divisée que la classe politique lundi, chaque titre, selon ses affinités, proclamant la victoire de son champion à la présidentielle, soit le président sortant Ali Bongo Ondimba, soit l'opposant et ex-cacique du régime Bongo, Jean Ping. Dubitative devant cet étalage de divisions, une jeune femme s'interrogeait à haute voix devant un kiosque du centre-ville de Libreville: "deux présidents pour un fauteuil, c'est quoi ça ?". !

La capitale gabonaise vit des lendemains de vote sous haute tension. Jean Ping, le principal rival du président sortant, Ali Bongo Ondimba, s’est proclamé élu, alors même que les opérations de compilation des votes se poursuivent.
Le jour même du vote, samedi 27 août, alors que les bureaux de vote pour l’élection présidentielle gabonaise n’avaient pas fini leur dépouillement, des « résultats » par bureaux ont commencé à circuler sur les réseaux sociaux. Craignant de se faire « voler » leur victoire, les partisans du candidat Jean Ping ont investi Facebook et des applications cryptées comme WhatsApp pour diffuser des chiffres en photos et en vidéos. « Je suis l’élu. J’attends que le président sortant m’appelle pour me féliciter », a déclaré Jean Ping ce dimanche devant la presse invitée à son quartier général.
Mensonges et trucages, a-t-on dénoncé dans le camp adverse, celui d’Ali Bongo Ondimba (ABO). « Ils ont fait venir des infographistes étrangers pour manipuler les images et les diffuser dans le but d’abuser la population », estime un membre de l’état-major de campagne du président sortant. Selon Alain Claude Billie By Nze, porte-parole d’ABO, ce dernier est en avance « irréversible » dans cinq provinces par rapport à son rival Jean Ping. Mais il est hors de question de diffuser les chiffres pour ne pas contrevenir aux prescriptions de la loi, qui réserve à la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap) et au ministre de l’Intérieur la primeur de la publication des résultats.
Un scrutin serré
Selon nos informations, les scores seraient serrés, notamment dans la province de l’Estuaire, la plus peuplée du pays. Alors que près de 600 bureaux de vote (sur 2580) manquaient encore au décompte dimanche en fin d’après-midi, les chiffres que nous avons consultés donnent une avance provisoire au président sortant, Ali Bongo Ondimba, crédité de 37,06% des votes tandis que son principal concurrent, Jean Ping suivrait en deuxième position avec 23,22% des suffrages. Les deux candidats finiront au coude à coude dans l’Estuaire, la province de Libreville.
En revanche, Jean Ping aurait d’ores et déjà remporté trois provinces : le Woleu Ntem, le Moyen Ogooué, l’Ogooué maritime, tandis qu’Ali Bongo Ondimba s’est imposé de manière écrasante dans le Haut Ogooué, l’Ogooué Ivindo, l’Ogooué Lolo, la Nyanga et la Ngounié. Près de 50 ans de règne entre le père et le fils Bongo, élu en 2009. Les deux candidats à la présidentielle, Ali Bongo et Jean Ping, se déclarent vainqueurs ce dimanche 28 août.
Jean Ping s’est autoproclamé vainqueur de l'élection présidentielle gabonaise, ce dimanche 28 août, acclamé par ses partisans. L'opposition rêve d'une ère nouvelle après un demi-siècle de règne sans partage de la famille Bongo. C'est la guerre des nerfs entre Jean Ping et Ali Bongo, le président sortant. Chaque candidat s'empresse de revendiquer la victoire. Les partisans d'Ali Bongo fêtent eux aussi la victoire de leur candidat. En 2009 déjà, même scénario. Deux candidats revendiquaient la victoire, d'où des émeutes qui avaient agité plusieurs villes du pays.
Ping, ministre et gendre de Bongo
Les résultats officiels ne seront proclamés que mardi en fin de journée. 48 heures à haut risque pour le Gabon. 49 ans au pouvoir, la famille Bongo au Gabon incarne à elle seule les dérives de la Françafrique. "Ali réélu", titre en une le journal Douk-Douk en dénonçant "les provocations et les violences exercées sur des partisans du candidat Ali".
"C'est Ping !" lui réplique en une son confrère L'Aube pour qui "une page se tourne" dans l'histoire du Gabon, dirigé par la famille Bongo depuis près d'un demi-siècle. "La bagarre a été âpre mais on ne s'est pas entretué", ajoute l'éditorial assurant: "chacun sait qui a gagné".
La Loupe juge de son côté que "la sous-région (d'Afrique centrale) n'aime pas la démocratie, les gouvernants détestent l'Etat de droit et adorent le pouvoir comme on ne peut l'imaginer", estimant que Jean Ping est désormais "face à ses responsabilités".
La une barrée d'un point d'interrogation avec la photo des deux candidats, Le Matin Equatorial constate: "un fauteuil, deux prétendants".
"Les déclarations triomphales des deux camps, faites après l'élection, pourraient ouvrir la voie à une période d'incertitude, voire mettre le feu si les acteurs politiques et les Gabonais n'y prennent garde", avertit l'éditorialiste du Matin, reprenant une crainte, partagée par de nombreux Gabonais, de troubles post-électoraux.
Quant au quotidien national L'Union, proche du gouvernement, il se veut le juge de paix de la presse en titrant sobrement "Election présidentielle de samedi: verdict demain mardi".
Tout en déversant, dans son billet d'humeur quotidien, un tombereau d'insultes sur le candidat Ping, à l'image d'une campagne électorale où les coups ont souvent volé très bas dans une partie de la presse gabonaise.

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