Après vingt ans de tourisme en Rdc la Monusco doit partir d'ici 2020

Kinshasa souhaite le départ en 2020 de la mission des Nations unies présente depuis 1999 en République démocratique du Congo, a indiqué mardi le ministre des Affaires étrangères Léonard She Okitundu, une semaine après le vote d'un nouveau mandat d'un an.

La nouvelle résolution intervient dans un contexte de tensions entre l'ONU et le président Kabila, sur fond de crise politique, sécuritaire et humanitaire.

Lors d'une conférence de presse le 26 janvier, le président Kabila avait déclaré vouloir "clarifier nos relations avec la Monusco", qu'il accusait de n'avoir éradiqué aucun groupe armé sévissant en RDC, voire de vouloir co-gérer le pays.

Plus récemment, Kinshasa vient de refuser de participer à une "conférence des donateurs" pour la RDC le 13 avril à Genève co-présidée par l'ONU, estimant que les Nations unies et les ONG exagéraient la crise humanitaire au Congo.

Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres envisagerait une visite en RDC avec le président de la commission de l'Union africaine Moussa Faki Mahamat dans les mois qui viennent pour souligner l'intérêt qu'il porte à la préparation des élections.

"Nous avons fait savoir au Conseil de sécurité que ce mandat était considéré comme l'avant-dernier avant un retrait définitif de la force après vingt ans de présence dans notre pays", a déclaré M. She Okitundu au cours d'une conférence de presse à Kinshasa.

Le ministre, qui a rang de vice-Premier ministre, a rappelé que le président Joseph Kabila avait déclaré que "la force onusienne ne peut nourrir l'ambition de rester indéfiniment" dans le pays devant les Nations unies en septembre.

Le ministre a par ailleurs confirmé que la RDC ne participerait pas à une conférence des donateurs prévue à Genève le 13 avril sous l'égide des Nations unies et de l'Union européenne.

Kinshasa estime que l'ONU et les ONG exagèrent la crise humanitaire en RDC, classé en niveau maximum "d'alerte 3" (L3) par les Nations unies dans trois provinces (Tanganyika, Sud-Kivu et Kasaï).

Ce classement "projette une image de catastrophe extrême et généralisée assimilant la situation en RDC à certains pays du monde où se déroulent des guerres de haute intensité", a souligné M. She Okitundu.

"Ce qui n'est absolument pas le cas de la RDC qui fait plutôt face à des attaques non conventionnelles et asymétriques des groupuscules terroristes et groupes armés criminels", a-t-il ajouté.

Le ministre a d'ailleurs rappelé que Kinshasa "aurait voulu que l'éradication" des groupes armés "soit la trame de la nouvelle résolution" des Nations unies au Congo.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité mardi une résolution qui renouvelle le mandat de ses Casques bleus en République démocratique du Congo et les charge d'aider à la préparation des élections.
Présenté par la France, ce texte prolonge le mandat de la Monusco, la plus importante force de l'ONU au monde, jusqu'en mars 2019 et souligne la nécessité de protéger les civils d'ici les élections historiques prévues en décembre pour organiser le départ du président Joseph Kabila.

La résolution "souligne la nécessité de faire tout ce qui est possible afin d'assurer que les élections du 23 décembre 2018 sont organisées avec les conditions requises de transparence, de crédibilité, d'ouverture et de sécurité".

Le Conseil appelle le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à préparer des plans incluant "toutes les options" en cas de besoin, dont l'envoi de renforts venus d'autres missions de l'ONU.

M. Guterres devra faire le point sur ces plans de contingence devant le Conseil dans 90 jours.

La résolution semble ne pas apporter quelque chose de nouveau, selon des analystes.

"Je ne vois pas ce qui pourra changer si le mandat de la Monusco reste le même. Si la Monusco ne passe pas d’une mission d’observation à une mission d’imposition de paix, je ne vois pas comment elle pourra contraindre le gouvernement congolais à organiser les élections au 23 décembre. Moi, je doute que le gouvernement voudrait vraiment aller aux élections à cette date ", affirme à VOA Afrique Kalele Kabila, professeur de sociologie politique à l’université de Kinshasa.

L’analyste rappelle que déjà "les forces de sécurité empêchent les Casques bleus à observer les manifestations " exigeant l’application complète de l’accord politique du 31 décembre 2016.

M. Kalele rappelle aussi qu’une précédente résolution du Conseil de sécurité sur la Monusco évoquait déjà des élections qui n’ont pas été tenues en dépit justement de l’accord politique entre le gouvernement et l’opposition.

Le plus grand pays d'Afrique sub-saharienne (2,3 millions de km2) n'a jamais connu de transition pacifique depuis son accession à l'indépendance en 1960.

D'après la résolution, les plus de 16.000 militaires de la Monusco seront chargés de soutenir le processus électoral, notamment l'inscription des électeurs, le scrutin et la transition au sommet du pouvoir attendue le 12 janvier.

La mission fournira une assistance technique et logistique pour soutenir le processus électoral. Elle formera en outre la police congolaise pour qu'elle assure la sécurité le jour du vote.

La Monusco relèvera tout atteinte aux droits de l'homme et les signalera au Conseil de sécurité.

Cette nouvelle résolution intervient dans un contexte de tensions entre l'ONU et le président Kabila, sur fond de crise politique, sécuritaire et humanitaire.

Une précédente résolution, en mars 2017, envisageait déjà une élection présidentielle en décembre 2017, un scrutin finalement reporté d'un an par les autorités congolaises, officiellement pour cause de violences dans le Kasaï (centre).

Le président Joseph Kabila restera au pouvoir au moins jusqu'à début 2019, plus de deux ans après la fin de son second mandat, le 20 décembre 2016 d'après la Constitution.

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