Chez les chimpanzés, les règles de communication sont les mêmes que chez l’Homme


Des chercheurs britanniques ont étudié dans le détail des milliers d'enregistrements vidéo de chimpanzés sauvages. Ils ont découvert que la communication entre ces grands singes suit les mêmes schémas que ceux observés dans le langage humain.

En langue congolaise, chimpanzé signifie « faux-homme ». Nous partageons 98% de nos gènes avec le primate. Mais ce lien de parenté ne nous empêche pas de nuire à l’espèce en détruisant son habitat ou en la braconnant…

Dans la famille des primates, le chimpanzé Pan troglodytes est le plus proche parent de l’Homme que n’importe quel autre grand singe vivant aujourd’hui : 98% de ses gènes sont identiques aux nôtres. Capable de concevoir et d’utiliser des outils, d’avoir une vie sociale très élaborée, il fait partie des espèces animales les plus intelligentes peuplant notre planète.

Son poil est noir et son visage, glabre, est souvent rose, parfois constellé de tâches plus foncées. Les jeunes chimpanzés ont des poils blancs au niveau de l’arrière-train qui disparaissent avec l’âge.

"la réelle menace pour la population reste les groupes armés, et non les animaux"

Les 790 000 hectares du parc des Virunga, la plus ancienne réserve naturelle d’Afrique située au Nord-Kivu, regorgent d’une faune aussi rare que diversifiée. Mais la cohabitation n’est pas toujours simple avec les villageois. Depuis plusieurs mois que la guerre fait à nouveau rage dans la région, les agressions par des animaux sauvages, notamment les chimpanzés, se multiplient.

On le retrouve dans les savanes, les zones boisées, herbeuses et les forêts humides, parfois jusqu’à plus de 2 000 m d’altitude. Animal très sociable, il vit en communauté constituée de groupes flexibles et mixtes dominés par un mâle. Les membres sont libres de rejoindre ou de quitter les communautés en fonction de leur statut reproductif et des ressources disponibles.

Aujourd’hui, le chimpanzé est classé sur la liste des espèces « en danger » de l’UICN. Alors que ses effectifs s’élevaient à près de 2 millions au début du 20ème siècle, aujourd’hui, ils ne dépassent pas les 500 000 individus.

La mort d’une fillette, en juin dernier, après une attaque de chimpanzés a fortement marqué les esprits à Goma, selon un de nos Observateurs sur place. L’incident a eu lieu à 60 km au sud de la capitale du Nord-Kivu, à Tongo, une localité située dans le territoire du Rutshuru. Attachée dans le dos de sa mère qui travaillait au champ, la petite fille de deux ans aurait été "arrachée" par cinq chimpanzés qui l’ont ensuite mortellement blessée.

La population nous demande d'abattre les bêtes.

Quand il s’agit d’animaux en voie de disparition, nous voulons éviter d’en arriver là même si nous en avons le droit. Par le passé, nous avons déjà eu de mauvaises expériences : des habitants se sont déjà plaints de la présence de gorilles mais nous nous sommes rendu compte, avant de faire quoi que ce soit, qu'il ne s'agissait que de prétextes créés de toute pièce pour que les animaux soient abattus et ainsi ne gènent plus les braconniers et autres trafiquants sur leur route.

Ce qui est arrivé à cette petite fille en juin dernier est tragique, mais n’oublions pas que dans le parc des Virunga, la réelle menace pour la population reste les groupes armés, et non les animaux. Depuis janvier, douze gardes forestiers de l’ICCN ont été tués par des rebelles, onze d’entre eux alors qu’ils étaient en train de protéger la population sur des routes du parc.

Des gardes forestiers refoulent un gorille du parc des Virunga d'une zone à une autre, pour l'éloigner d'habitations dont il avait détruit les récoltes. Cette vidéo date de 2010.

Ce billet a été rédigé avec la collaboration de Peggy Bruguière, journaliste à FRANCE 24.

"Le problème avec les chimpanzés, c’est qu’ils franchissent n’importe quelle barrière"

Même si nous assurons la survie de ces espèces menacées, notre priorité reste la protection des villageois des animaux et ce aussi au-delà des frontières du parc. Nous avons déjà eu affaire par le passé à des destructions de cultures par des éléphants. Nous avions alors installé des clôtures électriques. Le problème avec les primates, c’est qu’ils montent aux arbres et franchissent n’importe quelle barrière.

Une solution envisageable serait alors de refouler les chimpanzés dans des espaces très éloignés des habitations humaines. Mais la guerre rend presque impossible ces interventions, que ce soit autour du village de Tongo ou dans d’autres localités autour des Virunga. Le relief du parc est complexe et la présence de groupes armés dans les montagnes et les forêts nous empêche d’atteindre les chimpanzés.

Les chimpanzés, à la différence des gorilles, ont une nature potentiellement dangereuse si leur habitat est attaqué. Ils cohabitent dans des forêts avec des populations humaines qui ne cessent d’augmenter. Les villageois y coupent du bois pour se chauffer.

Ce bois, le makala ["charbon de bois" en swahili, ndlr], est la principale source d’énergie domestique au Congo. Pour la seule ville de Goma par exemple, la demande en makala représente 35 millions de dollars par an, ce qui implique une déforestation énorme [Il existe par ailleurs un commerce illégal de makala contrôlé aussi bien par les milices rebelles que par des éléments de l’armée congolaise, que notre Observateur évalue à 30 millions de dollars par an].

Résultat, les forêts se réduisent et les chimpanzés, qui se retrouvent comprimés dans leur espace de vie, migrent vers les villages pour trouver de la nourriture. Et les incidents impliquant des humains augmentent.

Pour les villageois, ce drame a été l’occasion de pointer du doigt les agressions de chimpanzés dont ils se disent régulièrement victimes : "Il ne se passe pas un mois sans qu’un de ces animaux ne tuent une personne", explique un habitant de Tongo cité par Syfia, une agence de presse congolaise. Une liste de 17 blessés et de 10 personnes tuées en l'espace de "quelques mois" a d’ailleurs été établie par les représentants de la société civile de Tongo, qui se disent "abandonnées" par les autorités.

Il est arrivé que des autorités locales autorisent les habitants à tuer les animaux agressifs en cas de légitime défense. Mais s’agissant d’espèces protégées, seul l’Institut congolais pour la protection de la nature (ICCN), dont sont membres les gardes forestiers du parc, a légalement le droit d’éliminer ces animaux.

Dans le langage humain, il existe une règle que les linguistes connaissent sous le nom de loi d'abréviation de Zipf. Elle stipule que les mots les plus fréquemment utilisés ont tendance à être courts. La loi de Menzerath, quant à elle, énonce que plus un objet linguistique est constitué d'éléments, plus ces éléments sont courts. Ces règles s'appliquent, quelle que soit la langue considérée.


Des chercheurs britanniques ont étudié dans le détail des milliers d'enregistrements vidéo de chimpanzés sauvages. Ils ont découvert que la communication entre ces grands singes suit les mêmes schémas que ceux observés dans le langage humain.


Des chercheurs de l'université de Roehampton (Royaume-Uni), notamment, se sont alors demandé si ces principes se retrouvaient aussi dans les modes de communication d’autres animaux. Ils ont donc étudié des séquences vidéo de chimpanzés sauvages vivant en Ouganda. Ceux-ci, bien sûr, ne parlent pas.

Des règles de communication universelles ?

Ainsi, les chercheurs ont pu identifier environ 2.000 exemples de 58 gestes uniques employés par ces chimpanzés. Des gestes de la main, des postures corporelles, des expressions faciales et même, quelques sons qu'ils peuvent être amenés à combiner pour transmettre une grande variété de messages.

Ces travaux ont confirmé que les règles langage humain s'appliquent à la communication entre chimpanzés. Les gestes les plus couramment utilisés par ces grands singes sont aussi les gestes les plus courts. Et lorsqu'une séquence de gestes exécutée par un chimpanzé est longue, elle est généralement composée de gestes courts. Des conclusions qui encouragent les chercheurs à se demander si ces principes de base se retrouvent aussi chez d'autres espèces comme le bonobo.






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