La défaillance dans le système de santé en Afrique-subsaharienne, ne devrait pas nous empêcher de vaincre coronavirus ?

Face au Covid-19, les personnels soignants en Afrique sont inquiets.

"Nous avons des défaillances dans le système de santé mais...

Alors que la pandémie de Covid-19 entre dans son quatrième mois, l’inquiétude est grande à l’OMS.

Le coronavirus connaît une escalade rapide partout dans le monde, a reconnu son Directeur général.

Le chef de l’OMS a, de nouveau, prévenu que la propagation du Covid-19 dans les pays en développement en Afrique et en Amérique centrale et du Sud pourrait avoir de graves conséquences sociales, économiques et politiques pour ces régions.

« Il est essentiel de veiller à ce que ces pays soient bien équipés pour détecter, tester, isoler et traiter les cas, et identifier les contacts », a-t-il dit, se disant encouragé de voir que ces actions soient entreprises dans de nombreux pays « malgré des ressources limitées ».

Dr Tedros a reconnu que les mesures de confinement et de restriction des déplacements décidées par de nombreux pays peuvent aider à limiter la transmission du virus, mais qu’elles peuvent avoir des conséquences imprévues pour les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables.

Il a appelé les gouvernements à mettre en place des mesures de protection sociale pour garantir aux personnes vulnérables la nourriture et d'autres éléments essentiels à la vie pendant cette crise.

L’Afrique de plus en plus touchée par le nouveau coronavirus doit “se préparer au pire” selon l’OMS.

Plus d’une quarantaine de pays du continent est désormais contaminée par le COVID-19, avec une forte augmentation ces derniers jours dans certains pays en particulier.

Dans cet article qui est régulièrement mis à jour, nous faisons le point de la situation sur l‘évolution de la maladie en Afrique, et comment les Etats s’organisent pour y faire face.

L’essentiel de l’info

La pandémie de coronavirus “s’accélère”.

Des mesures drastiques sont prises par certains pays sur le continent pour endiguer l‘épidémie de coronavirus.

Plusieurs ont décrété l‘état de catastrophe nationale.

Plusieurs nations expérimentent le traitement à base de la chloroquine sur ses malades.

Plus de 5 400 cas confirmés dans 49 pays pour plus de 131 décès en Afrique.
Guérisons : Egypte (95), Algérie (65), Burkina Faso (31), Sénégal (27), Afrique du Sud (12), Maroc (15), Nigeria (8), Côte d’Ivoire (6), Cameroun (5), RDC (3), Namibie (2), Brazzaville (2), Tunisie (2), Ghana (1), Kenya (1), Congo, Somalie (1), Togo (1), Tanzanie (1), Angola (1).

La pandémie du coronavirus nécessite-t-elle un plan d’action global en faveur de l’Afrique ?

Jean-Paul Mvogo : La coordination de la riposte sur le continent doit être portée par les Africains eux-mêmes même si cela implique l’intervention de tout le monde.

Certaines institutions africaines, dont la Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies, l’Union Africaine et les ministres des Finances africains, y réfléchissent déjà en termes de chiffrage des besoins.

Quelles sont les économies africaines les plus touchées depuis le début de la pandémie ?

Jean-Paul Mvogo : Les premiers pays africains touchés sont soit ceux qui figurent sur la mappemonde touristique, soit les carrefours de la mondialisation.

C’est d’abord par le canal du tourisme et du transport que l’impact se fait ressentir.

Au Maroc, en Égypte, en Afrique du Sud mais aussi dans des petits pays comme l'île Maurice ou le Cap-Vert.

Les pays relais de la mondialisation sur le continent comme l’Éthiopie, le Kenya, le Ghana, l’Afrique du Sud ou le Nigeria sont aussi affectés.

Ils servent de portes d’entrée pour les investisseurs en Afrique, abritent les sièges régionaux de grandes institutions ou de multinationales et disposent de fortes communautés d’expatriés.

Ils sont donc touchés par le ralentissement des flux financiers.

D’autres pays seront touchés plus tard, notamment à cause de la chute des cours du pétrole et baisse des matières premières.

L’Angola en tant que premier exportateur d’or noir vers la Chine, mais aussi l’Afrique du Sud et le Congo Brazzaville, les deuxième et troisième plus grands partenaires commerciaux de la Chine.

Ou encore les pays qui exportent beaucoup vers la Chine comme la République Démocratique du Congo, le Tchad, le Gabon, la Guinée et la Guinée Equatoriale.

Avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), l’OMS a demandé un allégement de la dette des pays en développement.

Lundi dernier, la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED) avait plaidé pour une annulation de la dette de ces pays pour un montant de 1.000 milliards de dollars.

L’OMS continue d’évaluer la pertinence des masques de protection

L’OMS a indiqué qu’elle continuait d'étudier les preuves sur la pertinence de l'utilisation des masques pour se protéger du coronavirus.

« Un débat est en cours sur l’utilisation des masques au niveau communautaire », a déclaré Dr Tedros.

Si l’agence onusienne recommande l'utilisation de masques médicaux pour les personnes malades et celles qui en prennent soin, elle souligne toutefois que leur utilisation n’est efficace que lorsqu'elle est combinée à d'autres mesures de protection.

« L'OMS continue de rassembler toutes les preuves disponibles et continue d'évaluer plus largement l'utilisation potentielle des masques pour contrôler la transmission du Covid-19 au niveau communautaire », a souligné son Directeur général.

L’agence onusienne a réitéré sa priorité : faire en sorte que les agents de santé en première ligne dans la lutte contre la pandémie puissent accéder aux équipements de protection individuelle essentiels, y compris les masques médicaux et les respirateurs.

« C’est pourquoi nous continuons à travailler avec les gouvernements et les fabricants pour accélérer la production et la distribution d’équipements de protection individuelle, y compris les masques », a souligné Dr Tedros.

De nouvelles directives pour le lavage des mains

Il y a trois mois, le monde ne savait presque rien du nouveau coronavirus. « Collectivement, nous avons appris énormément. Et chaque jour, nous en apprenons plus », a dit Dr Tedros.

« Nous travaillons également d'arrache-pied avec des chercheurs du monde entier pour générer des données probantes sur les médicaments les plus efficaces pour traiter le Covid-19 ».

L'OMS élabore des orientations basées sur l'ensemble des preuves collectées dans le monde entier. « Chaque jour, notre personnel parle à des milliers d'experts à travers le monde pour collecter et distiller ces preuves et expériences.

Nous révisons et mettons à jour constamment nos conseils à mesure que nous en apprenons davantage, et nous nous efforçons de les adapter à des contextes spécifiques », a précisé le Directeur général.

Si l’OMS recommande le lavage des mains et la distanciation physique, elle reconnaît toutefois que ces mesures représentent un défi pratique pour ceux qui n'ont pas accès à l'eau potable ou qui vivent dans des conditions exiguës.

En collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et la Fédération internationale de la Croix-Rouge, l’agence onusienne a publié de nouvelles directives pour améliorer l'accès au lavage des mains.

Ces directives recommandent aux pays de mettre en place des stations de lavage des mains à l'entrée des bâtiments publics, des bureaux, des arrêts de bus et des gares.

Face au Covid-19, l’UNESCO appelle à un meilleur partage des connaissances scientifiques.

L’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a organisé lundi une réunion virtuelle sur le Covid-19 avec des représentants des ministères en charge des sciences du monde entier.

Pas moins de 122 pays étaient représentés, avec la participation de 51 ministres, de 26 vice-ministres, ainsi que de Mariya Gabriel, Commissaire européenne pour la recherche et l’innovation, Sarah Anyang Agbor, Commissaire de l’Union africaine chargée de la science, Moisés Omar Halleslevens Acevedo, ancien Vice-Président du Nicaragua et de Dr Soumya Swaminathan, Scientifique en chef à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).

L’objet de cette réunion était d’échanger sur l’importance de la coopération internationale en matière scientifique et d’un investissement plus important dans ces domaines dans le contexte du Covid-19.

L’importante question de la « science ouverte » - sur laquelle l’UNESCO prépare une recommandation internationale depuis novembre dernier - a été longuement évoquée.

La Directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, a appelé les gouvernements à renforcer leur coopération scientifique et à intégrer la science ouverte dans leurs dispositifs de recherche, afin de prévenir et d’atténuer les crises mondiales.

« La pandémie de Covid-19 nous fait prendre conscience de l’importance de la science à la fois en matière de recherche et de coopération internationale.

Cette crise nous montre aussi l’urgence d’un meilleur partage des connaissances à travers la science ouverte.

Il est temps de nous engager tous ensemble », a déclaré Mme Azoulay.

Pour Mme Swaminathan, de l’OMS, « la collaboration est réellement essentielle pour la connaissance et le partage de données, ainsi que pour faire progresser la recherche sur le Covid-19.

Au moment où les barrières commerciales et les obstacles logistiques empêchent le déplacement de biens essentiels, il est important de souligner que l’on doit permettre à la science de diriger la réponse mondiale à cette pandémie ».

Mme Anyang Agbor, de l’Union africaine, a souligné pour sa part que l’Afrique avait besoin d'une entreprise de recherche plus forte qui mobilise le monde universitaire et les secteurs public et privé.

« L'Union africaine a reconnu à la fin de l’an dernier que la science ouverte pouvait changer la donne dans la lutte contre les inégalités », a-t-elle dit.

« Nous dépendons tous de la science pour survivre »

Ces dernières semaines, la communauté scientifique internationale s’est mobilisée face à l’urgence du Covid-19, par un partage et une mise en accès libre des résultats de recherche, et une réforme sans précédent de ses méthodes :

ouverture à tous par les principaux journaux scientifiques du répertoire sur le virus, publication de plus d’un millier d’articles de recherche scientifique en accès libre en réponse à l’appel de l’OMS, mise en place de consortiums internationaux de recherche en quelques jours, permettant des progrès rapides et un séquençage de l’ADN du virus en quelques semaines.

« Nous dépendons tous de la science pour survivre », a conclu pour sa part Marcos Pontes, le Ministre de la science, de la technologie, de l’innovation et de la communication du Brésil.

Les discussions de cette réunion virtuelle de l’UNESCO sur la science ouverte ont portés sur les pistes suivantes :

-    La mutualisation des connaissances et des efforts en soutien à la fois à la recherche scientifique et à la réduction du déficit de connaissance entre pays.

-    La mobilisation des décideurs, chercheurs, innovateurs, éditeurs, de la société civile pour permettre l’accès libre aux données scientifiques, aux résultats de la recherche, aux ressources éducatives et aux infrastructures de recherche.

-    Le renforcement des liens entre la science et les décisions politiques, afin de répondre aux besoins de la société.

-    L’ouverture de la science à la société y compris quand les frontières se ferment.

Au Togo tout comme en Côte d'Ivoire, des soignants s’inquiètent du manque de moyens de protection.

Des agents de santé ont contracté la maladie après avoir été en contact avec des patients du Covid-19.

En Europe, plusieurs agents de santé ont déjà perdu la vie en tentant de venir en aide aux personnes touchées par le Covid-19.

Une situation que redoutent les personnels soignants dans les pays africains aux systèmes de santé jugés défaillants.

Au Togo par exemple, trois médecins et une infirmière ont contracté la maladie après avoir été en contact avec des patients du Covid-19.

Gilbert Tsolenyanu, secrétaire général du Syndicat national des praticiens hospitaliers du Togo (SYNPHOT), explique que " malheureusement nous avons quatre collègues contaminés sur les 34 cas que compte le Togo.

Cela peut être un coup pour nous. Mais ce n’est pas une raison pour nous d’abandonner. Nous sommes déterminés à continuer."

Gilbert Tsolenyanu demande "des mesures de protection.

Nous avons des défaillances dans le système de santé mais cela ne devrait pas nous empêcher de vaincre, de triompher. "

Les personnels soignants veulent être bien équipés pour faire face au Covid-19.

Tout manque dans les hôpitaux.

Les agents de santé en Côte d’Ivoire, ne veulent pas vivre la situation de leurs camarades du Togo.

Dans une déclaration faite le 29 mars 2020, ils ont invité le gouvernement à prendre les mesures qui leur permettront de faire face en toute sécurité au Covid-19.

À titre de comparaison, lors de la crise financière de 2008, l’Afrique n’avait pas été trop touchée, les conséquences se sont faites ressentir avec une année de retard à travers la chute des exportations.

Mais aujourd’hui, cette crise sanitaire l’affecte très durement notamment par le biais du tourisme, avec des annulations de réservations de plus de 50%.

Certains acteurs européens et américains évoquent un plan d’aide pour l’Afrique.

Il y a une prise de conscience afin de ne pas répéter les erreurs du passé qui ont abouti à la crise de la dette des années 1980.

Reste aussi à tirer les leçons de la crise de 2008. Il ne faut surtout pas que l’argent injecté soit utilisé pour spéculer comme en 2008, ce qui avait été à l’origine de crises alimentaires en Afrique.

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