« Jeunesse africaine : bombe à retardement ou sous développement et opportunité à saisir ? »

" Une croissance sans emplois.Le taux de chômage inquiétant de la jeunesse africaine est souvent mis en parallèle avec la croissance économique rapide du continent. Selon la BAD, le taux de chômage en Afrique subsaharienne est de 6 %, alors que 6 des 10 économies à la croissance la plus rapide du monde se trouvent dans cette région. Ce taux peut ne pas sembler très élevé par rapport à la moyenne mondiale d’environ 5 %. Mais dans la plupart des pays africains, le chômage des jeunes « est au moins deux fois supérieur à celui des adultes », souligne la BAD.Selon la Banque mondiale, les jeunes représentent 60 % de l’ensemble des chômeurs africains. En Afrique du Nord,le taux de chômage des jeunes atteint 30 %. Au Botswana,en République du Congo,au Sénégal,en Afrique du Sud et dans plusieurs autres pays, la situation est encore plus préoccupante.Les jeunes femmes sont plus durement touchées. La BAD a constaté que dans la plupart des pays d’Afrique subsaharienne et dans tous ceux de l’Afrique du Nord,il est plus facile pour les hommes que pour les femmes d’obtenir un emploi,à niveau d’expérience et de compétences égale. Beaucoup d’analystes estiment qu’il existe une autre raison de s’intéresser davantage à la jeunesse africaine. Avec 200 millions d’habitants âgés de 15 à 24 ans,l’Afrique a la population la plus jeune au monde. Selon le rapport Perspectives économiques en Afrique,établi en 2012 notamment par la Banque africaine de développement (BAD), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), la Commission économique pour l’Afrique (CEA) et l’Organisation de coopération et de développement économiques des pays industrialisés (OCDE),ce chiffre devrait doubler d’ici à 2045. Les dirigeants prennent conscience de la nécessité de créer des emplois. Principale leçon de ces violences pré-électorales : le chômage des jeunes, 15 % au Sénégal,risque d’attiser violence politique et troubles civils. Une enquête réalisée en 2011 par la Banque mondiale a montré qu’environ 40 % de ceux qui rejoignent des mouvements rebelles se disent motivés par le manque d’emplois. Les gouvernements africains luttent donc contre le chômage à plusieurs niveaux. Au Sénégal,le président Sall a lancé en février 2013 un programme visant à créer 30 000 emplois d’ici la fin de l’année et éventuellement 300 000 d’ici 2017.Lors de l’élection présidentielle de 2012, l’opposition sénégalaise a invoqué le taux élevé de chômage pour mobiliser les jeunes contre l’ancien Président Abdoulaye Wade. C’est principalement le manque d’emplois qui a incité de nombreux jeunes à investir les rues et à voter pour un nouveau gouvernement. Les manifestations ont fait au moins six morts et M. Wade a été vaincu par le président actuel,Macky Sall. Réalité masquée: Le sous-emploi ne constitue pas une solution à la pauvreté,reconnaît l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui signale que jusqu’à 82 % des travailleurs africains sont des « travailleurs pauvres. Selon les Perspectives économiques en Afrique,plus de 70 % des jeunes Africains en moyenne vivent avec moins de 2 dollars par jour,le seuil de pauvreté défini à l’échelle internationale. République du Congo,de la République démocratique du Congo,de l’Éthiopie,du Ghana,du Malawi,du Mali,du Rwanda,du Sénégal et de l’Ouganda sont à leur compte ou contribuent à des activités familiales. Bombe à retardement : Les statistiques du chômage en Afrique ne tiennent pas compte des emplois précaires et du sous-emploi dans le secteur informel. Selon un rapport de la Brookings Institution,organisme de réflexion indépendant basé à Washington, Les jeunes [africains] trouvent du travail,mais pas à des rémunérations correctes et sans la possibilité de perfectionner leurs compétences ou d’avoir une certaine sécurité de l’emploi. Plus de 70 % des jeunes de la Gabriel Benjamin,chômeur diplômé de l’université de Lagos (Nigéria),explique qu’on rencontre souvent de jeunes Nigérians diplômés qui font de petits boulots. Ils nettoient les sols dans des hôtels,vendent des cartes de recharge téléphoniques ou sont même ouvriers dans des usines. La Brookings Institution considère le sous-emploi comme un grave problème,qui masque la réalité dans les pays au faible taux de chômage. M. Chikwanda entend ainsi attirer l’attention sur les conséquences d’un taux de chômage des jeunes aussi important sur un continent où chaque année près de 10 à 12 millions de jeunes arrivent sur le marché du travail. Ahmad Salkida, journaliste nigérian qui a été l’un des rares à avoir pu approcher les militants du groupe Boko Haram, a déclaré àAfrique. « C’est là une réalité inacceptable pour un continent possédant une réserve aussi impressionnante de jeunes, talentueux et créatifs », souligne Mthuli Ncube, économiste en chef de la BAD. Alexander Chikwanda, Ministre zambien des finances, résume ainsi la situation : Le chômage des jeunes est une bombe à retardement , qui semble maintenant dangereusement proche de l’explosion."

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