Funéraille du musicien Papa Wemba en Rdc : Les autorités de la République démocratique du Congo ont mis en garde mercredi à Kinshasa la population contre toute "récupération politique" des funérailles de l'emblématique chanteur congolais Papa Wemba, à la veille du rapatriement de sa dépouille d'Abidjan. "Nous voulons situer ce deuil officiel uniquement sur le plan culturel. Nous ne voulons pas de la récupération politique", a déclaré à la presse le ministre congolais de la Culture, Banza Mukalay. "C'est l’État congolais qui pleure un de ses fils les plus méritants qui a fait l'honneur" de la RDC à travers le monde, a-il ajouté, souhaitant que les funérailles se déroulent "dans le calme [et] la dignité". Depuis des mois, le climat politique est très tendu en RDC en raison de l'incertitude liée au très probable report de l'élection présidentielle censée avoir lieu fin novembre.

Le chateur congolais, Papa Wemba connu des ennuis de santé en mars dernier à Kinshasa la capitale. Des informations faisaient même état de son hospitalisation, voire de coma. Mais l’artiste congolais de 66 ans Papa Wemba avait démenti. Samedi, il était arrivé en pleine forme à Abidjan. S’exprimant devant les caméras, pour ce qui allait constituer ses dernières interviews avec la presse, le « roi de la rumba » se disait encore prêt à donner le meilleur de lui-même dans la capitale économique ivoirienne pour la 9e édition du Festival des musiques urbaines d’Anoumabo (FEMUA), fondé par le groupe ivoirien Magic System. Il devait ensuite se rendre à Korhogo, à 600 km au nord d’Abidjan.
Mais sur scène, au petit matin du dimanche 24 avril, Papa Wemba s’écroule. Alors que les musiciens continuent à jouer, les danseuses s’attroupent au-dessus de l’artiste. Des secours accourent pour tenter de le réanimer. Il rendra l’âme sur la route de l’hôpital, selon les organisateurs du festival. Mais pour des témoins, Jules Shungu Wembadio Pene Kikumba avait déjà expiré sur la scène, le micro à la main. Les dispositions sanitaires mises en place ne semblaient pas suffisantes, estiment-ils.
« Il n’y avait qu’une seule ambulance installée, à une dizaine de mètres derrière le podium. Pendant le drame, les premiers secouristes ont dû appeler les médecins à la rescousse pendant cinq minutes au moins, avant que ceux-ci ne débarquent », raconte Sylvain, journaliste culturel ivoirien, présent au pied de la scène.
« Et puis, lorsque Papa Wemba a fait sa chute, le premier secouriste qui est intervenu avait visiblement de la peine à procéder à un massage cardiaque, à tel point qu’une des danseuses a été obligée de lui apporter de l’air avec une serviette de fortune », déplore-t-il, encore sous le choc d’une scène qui continue de faire le tour des chaines de télévision.
Jean-Marie Attéby, reporter-photographe, corrobore presque ce témoignage. « Il s’est passé un long moment où tout le monde était paniqué autour de l’artiste et où les soins d’urgence manquaient », affirme-t-il. Attéby a saisi les images de l’évacuation de Papa Wemba de la scène au véhicule de secours. Mais à la demande des organisateurs, souligne-t-il, la police lui a confisqué son appareil photo.
La sécurité au détriment du dispositif sanitaire
De cette organisation, Sylvain note surtout l’attention particulière accordée à la sécurité, en raison du problème terroriste (le pays a subi une attaque le 13 mars à Grand-Bassam, au sud du pays) au détriment du volet sanitaire. « C’est une attitude récurrente à Abidjan, de ne pas faire place aux dispositions sanitaires. Aujourd’hui, ce drame devrait servir de leçon », dit-il.
« Moi je n’ai toujours pas compris pourquoi, malgré son âge et sa santé fragile, Papa Wemba a été autorisé à se produire si tard. En sa qualité de parrain, entonner deux titres aurait suffi. Je pense que les organisateurs ont fait preuve de négligence sur certains détails de ce genre », accuse Germaine Nguessan, une retraitée.
Pour Guy Michel, l’un des chargés de communication du FEMUA, un dispositif sanitaire était en place et ne souffrait d’aucune faille. « Nous avons mobilisé deux ambulances médicalisées. Une était postée à l’entrée du festival et l’autre à la sortie. D’autre part, des sapeurs-pompiers, ainsi que des médecins étaient sur place, explique-t-il au Monde Afrique. Tout ce monde a été prompt à réagir. Malheureusement, ça n’a pas suffi. Dimanche lors d'un meeting populaire, des opposants au président congolais Joseph Kabila ont appelé la population à "accentuer la pression" sur le régime afin d'exiger la tenue du scrutin avant la fin de l'année.
L'opposition accuse M. Kabila, au pouvoir depuis 2001 et à qui la constitution interdit de se représenter, de manœuvrer pour se maintenir au pouvoir au-delà du terme de son mandat en décembre.
Selon M. Banza, la dépouille de Papa Wemba arrivera jeudi à 8h00 (7h00 GMT) à l'aéroport de Ndjili et sera gardée à la morgue, tandis que les obsèques officielles auront lieu lundi au stade des Martyrs et l'enterrement mardi dans la périphérie de Kinshasa.
De grandes affiches en toile frappées à l'effigie du chanteur, peintes aux couleurs du drapeau de la RDC (rouge-jaune-bleu) sur lesquelles on peut lire: "Papa Wemba, mille mercis" sont visibles aux côtés d'autres banderoles que font flotter les entreprises brassicoles ou bancaires dans les artères kinoises.
M. Banza a également appelé les Congolais à "bien s'habiller" pour pleurer le "prince de la SAPE" (Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes), mouvement dont l'artiste a été l'un des initiateurs au Zaïre dans les années 1970 et qui se caractérise par les plus grandes audaces vestimentaires.
Personnalité flamboyante, Papa Wemba était depuis plus de 40 ans un des chanteurs africains les plus populaires.
Il est mort sur scène dimanche, après s'être effondré en plein concert à Abidjan où il participait au Festival des musiques urbaines d'Anoumabo (Femua).

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