Nouveaux défis dans l'application de l'accord sur la fin du régime Kabila en République Démocratique du Congo ! L'accord consacrant la cogestion de la République démocratique du Congo entre la fin du mandat du président Joseph Kabila et l'élection de son successeur en principe à la fin de l'année suscite des interrogations sur sa mise en œuvre, deux jours à peine après sa signature. Les deux camps sont parvenus in extremis samedi à trouver un terrain d'entente après quinze jours de négociations, présentées comme de la dernière chance, sous l'égide des évêques catholiques de la RDC. Le compromis passé prévoit que M. Kabila, dont le mandat s'est achevé le 20 décembre et à qui la Constitution interdit de se représenter, restera en place pour une année supplémentaire :

Les acteurs politique ne sont pas sur le même ligne ! Lors de sa signature le président de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco), Mgr Utembi, avait invité les parties à appliquer l'accord "de bonne foi", prenant à témoin le peuple congolais et des diplomates présents lors de la cérémonie dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier.
Outre l'influente Eglise catholique, la communauté internationale fait pression de son côté.
La Belgique, ancien pays colonisateur, a promis qu'elle "sera attentive à la mise en œuvre" de l'accord, alors que "la France appelle les signataires et les parties engagées par l'accord à respecter leur parole".
Pour les États-Unis, cet accord est "une étape historique" pour sortir la RDC de la crise née du maintien de M. Kabila, 45 ans et au pouvoir depuis 2001, au-delà de la fin de son mandat. L'ONU et l'Union européenne ont "salué" cet accord et encouragé les parties à la consolidation du consensus trouvé le 31 décembre.
- 'Difficulté de taille' -
Mais de première difficultés ont immédiatement surgi.
La majorité qui a signé sous réserve cet accord de sortie de crise argue que le compromis "pêche" parce que toutes les composantes aux négociations ne l'ont pas signé.
En sont absents le Mouvement de libération du Congo (MLC) de l'ancien vice-président de la République Jean-Pierre Bemba, actuellement détenu à la Cour pénale internationale (CPI), et une frange minoritaire de l'opposition.
Se basant sur cette absence de consensus, la majorité estime que l'investiture par l'Assemblée nationale du futur gouvernement de transition dépendra du règlement de la question de l'"inclusivité", c'est à dire de la signature de l'accord par les réfractaires.
"C'est une difficulté de taille, comment le Premier ministre du Rassemblement sera-t-il investi par l'Assemblée nationale alors qu'il ne dispose pas d'un seul député", s'interroge Eve Bazaïba, secrétaire général du MLC.
De la même manière, il reviendra à la majorité parlementaire d'instituer et d'organiser le fonctionnement du CNSAP par une loi organique à voter par les députés lors de sa session de mars.
Lors des discussions, le MLC avait exigé la présidence de cet organe, accusant le Rassemblement de M. Tshisekedi de monopoliser les postes, y compris celui de Premier ministre, durant la période qui va de la fin du mandat de M. Kabila à l'élection de son successeur, au plus tard fin décembre 2017.
Toutes ces questions doivent être réglées lors des négociations qui débutent mardi, dites de recherche d'un "arrangement particulier", a assuré Christophe Lutundula du Rassemblement.
Beaucoup de questions restent en suspens après la signature, samedi 31 décembre, de l'accord entre majorité présidentielle et opposition de RDC. Les bons offices des évêques catholiques, qui ont accompagné et supervisé les négociations, sont loin d'être terminés. Les différentes composantes politiques congolaises doivent encore se retrouver pour arriver à un consensus sur un «arrangement particulier» portant sur de nombreuses questions, dont le calendrier d'application de l'accord. Une première réunion devrait se tenir en début de semaine. Certains points inquiètent, comme les réserves émises à côté de la signature de la majorité présidentielle au bas de l'accord. D'autres rassurent, comme l'annonce de la fin des poursuites judiciaires contre plusieurs opposants.
C'est avec soulagement mais prudence que la communauté internationale a accueillie la signature samedi de l'accord entre opposition et majorité en RDC. L'Union européenne et la Monusco ont souligné que le travail devait continuer pour une mise en œuvre effective de l'accord. Une prudence notamment alimentée par les réserves officiellement formulées par la majorité au moment de la signature.
En contre-partie, l'opposition doit diriger un gouvernement de transition jusqu'aux nouvelles élections prévues fin 2017 - la présidentielle qui devait avoir lieu fin 2016 a été reportée sine die - et un conseil de supervision sera chargé de veiller au respect de l'accord.
"Chacun dans les deux camps a compris qu'il fallait absolument signer cet accord pour éviter le chaos. Ils ont aussi compris que celui qui prendrait l'initiative de saboter sa mise en œuvre portera l'entière responsabilité des conséquences de ce chaos", explique le professeur Jean-Pierre Mbwebwa, politologue de l'université de Kinshasa.
Mais si le compromis a évité une explosion de violences, de nombreuses questions restent en suspens.
De premières discussions sur la mise en oeuvre de l'accord sont prévues dès mardi.
Des représentants du pouvoir et de l'opposition doivent se retrouver pour déterminer la composition du Conseil national de suivi de l'accord et du processus électoral (CNSAP) et le mode de désignation de ses 28 membres.
Ils doivent aussi décider de la composition du gouvernement de transition dont le Premier ministre devra provenir du "Rassemblement", la coalition formée autour de l'opposant historique Étienne Tshisekedi, âgé de 84 ans.

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